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De notre correspondant
Marc CHARTIER


Architecture et développement durable - 18 juin 2006



Au cours du siècle passé, l'architecture s'est trouvée confrontée à un vaste chantier : celui de l'urbanisation de plus en plus densifiée, comme réponse à la croissance démographique et à la recherche de conditions de vie plus décentes.

Deux écueils toutefois la guettaient, dans son rôle d'aménagement de la cité. Tout d'abord, loin des « grandes promesses », la ville s'est révélée être « la source de problèmes considérables, directement liés à [son] double rôle historique : d'une part, celui de phare et de gardien de la civilisation ; de l'autre, celui de réservoir de misère humaine ». L'industrialisation, ensuite, a vite montré ses limites lorsqu'il s'est agi d'évaluer objectivement la qualité de vie des habitants de la cité, privés qu'ils étaient d'une véritable identité basée sur leur patrimoine culturel originel et d'un contact avec un environnement régénérant.

Partant de ce constat, James Steele définit, dans son ouvrage Architecture écologique (Actes Sud, 2005, 272 pages), les principes d'un nouvel art de construire qui s'inspire des valeurs et impératifs du développement durable : gestion raisonnée de l'extension des villes, priorité donnée aux économies d'énergies, recours aux savoir-faire et matériaux traditionnels et locaux, intégration des valeurs culturelles authentiques et diversifiées, création d'espaces de vie à la fois esthétiques et intégrés dans un environnement protégé, lutte contre les multiples sources de pollution de nos modes de vie modernes...

Certes, nombreux sont les projets ou réalisations qui ont cherché à concilier urbanisme, technologie et tradition, les trois piliers d'une architecture humaniste, soucieuse d'une esthétique écologique. James Steele consacre à leurs auteurs le coeur de son ouvrage : l'Ecossais Charles Rennie Mackintosh, qui confia à l'architecture vernaculaire les fonctions de lutte contre la rigueur du climat ; Ebenezer Howard, l'inventeur des cités-jardins comme transitions entre les villes et la campagne ; Frank Lloyd Wright, promoteur d'une architecture "organique" inspirée des traditions japonaises et adaptée à des conditions climatiques spécifiques ; Rudolf Schindler, dont la "California house" encourageait la communication entre l'intérieur et l'extérieur du bâtiment, en privilégiant la ventilation naturelle ; l'architecte égyptien Hassan Fathy, guidé par un idéal nationaliste qui l'amena à "Construire avec le peuple" ; l'Indien Balkrishna Doshi qui, réconciliant le modernisme occidental avec une sensibilité écologique, est particulièrement soucieux d'améliorer la qualité des habitations à loyer modéré ; Malcolm Wells et James Turrell, pionniers de l'habitat souterrain ; Edward Mazria, dont les recherches sur l'accumulation solaire passive marquèrent les années 1970 ; etc.

Ces différentes approches d'une architecture de la "vivabilité" sont présentées comme autant de réponses « à notre crainte grandissante de perdre tout lien avec la nature et [de] nous laisser envahir par l'industrialisation ». La partie, assurément, n'est pas gagnée d'avance. Des interrogations demeurent sur un contexte mondial - celui de la "post-globalisation" - où « toutes les initiatives s'appuyant sur la tradition et les stratégies environnementales auxquelles elles sont inextricablement liées deviennent de plus en plus incertaines ». Et l'auteur de conclure: « Notre éloignement de la nature est un processus désormais à l'oeuvre. »

Est-ce pour autant pour qu'il faille s'adonner au pessimisme ? Certainement pas ! Dans la lignée des réalisations exemplaires illustrées ici par l'auteur, une architecture respectueuse de l'environnement naturel se présente comme une nécessité de toute urgence pour notre nouveau siècle. Pour ce faire, les populations doivent sacrifier leurs intérêts à court terme « dans la perspective d'un profit à long terme ». Plus fondamentalement encore, la discipline et la sagesse de chacun sont plus que jamais sollicitées pour que notre monde soit effectivement compris comme un espace à vivre et à partager.





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